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Parlons féminisme blanc

  • Emma
  • 25 sept. 2016
  • 4 min de lecture

crédit : Janna Yashchuk

crédit photo : Janna Yashchuk

Le féminisme, souvent critiqué et malheureusement mal compris est aujourd'hui scindé en deux blocs : les féministes de « couleurs » ou POC et les féministes « blanches ». J'ai découvert ces appellations assez récemment, notamment sur les réseaux sociaux, où, à coups de retweets et de likes, on bataille pour qui sera la meilleure féministe, celle avec les meilleures idées et les meilleurs arguments. D'abord surprise par ses oppositions constantes, j'ai cherché à comprendre d'où elles venaient, et quelles en étaient les principales raisons.

Une féministe dite « blanche » est une personne se concentrant uniquement sur les problèmes des femmes blanches, venant de pays développés, criant haut, et fort que « les femmes musulmanes ne devraient pas avoir le droit de porter le hijab, ou la burqa », considérant ces derniers comme oppressifs. Est-ce utile d'ajouter qu'énormément de femmes voilées portent le voile parce qu'elles le veulent ? Une féministe blanche répondrait alors : « Ces femmes sont lobotomisées par leurs maris, en interdisant le voile, on leur rendrait leur liberté ».

Une féministe « blanche » oublie que les latino-américaines ou les afro-américaines doivent se battre deux fois plus pour obtenir un travail, ou se faire une place dans la société, car en plus d'être femme, elles doivent se battre contre le racisme et la discrimination.

Une féministe « blanche » va se battre pour pour une égalité salariale entre les hommes et les femmes, oubliant de mentionner qu'une femme de couleur noire sera encore moins payée qu'une femme de couleur blanche, que ça soit pour un simple job chez Carrefour, ou dans l'industrie du cinéma où les femmes de couleurs sont souvent reléguées au statut de love-interest. Une féministe « blanche » ne prête pas attention aux transexuel(le)s, aux gays et lesbiennes, et aux femmes appartenant à de petites minorités, car une féministe blanche, est, par définition, blanche et hétéro (on rappelle ici que toutes les femmes blanches ne sont pas des féministes dites « blanches ». Cette appellation est utilisée car la majorité de ces féministes sont blanches et issus de pays développés). On parle ici d'intersectionnalité : chaque femme subira l’oppression différemment selon son statut social, sa couleur de peau, son origine ou encore sa sexualité.

Une féministe blanche ne parlera pas de Sandra Bland, une femme plaquée au sol par un policier, qui lui dira en braquant son tazer « je vais t'allumer ». Sandra Bland qui s'est suicidée dans sa cellule. Elle n'en parlera pas, car une femme blanche ne se retrouvera pas en prison parce qu'elle est noire.

Une féministe blanche fera ce qu'on appelle du slut-shaming (intimidation des salopes) en insultant Nicki Minaj, Rihanna ou encore Kim Kardashian pour avoir montrer leur corps, pour ne pas avoir porté de soutien-gorge sous leur t-shirt ou pour avoir danser sur scène de façon trop provocante à son goût. On se souvient notamment des propos très controversés de Lou Doillon : « Quand je vois Nicki Minaj et Kim Kardashian, je suis scandalisée. Je me dis que ma grand-mère a lutté pour autre chose que le droit de crâner en string. ». La même Lou Doillon qui pose seins nus pour un photoshoot. Alors, pour la fille de Jane Birkin, une fille de couleur n'a pas pas le droit d'exposer son corps ? Mais une femme blanche, oui ? Doit-on encore rappelé que nous possédons notre propre corps, que celui-ci est notre propriété, et si ça nous plaît de le montrer, parce qu'on l'aime, on le fait, qu'on soit noire ou blanche ? Que personne ne doit nous dicter ce que l'on fait ou ne fait pas avec ? Notre corps, on le couvre et on le découvre si on le souhaite.

Le slut-shaming est bien trop présent dans notre société, et il est trop souvent lié aux double-standards, que ça soit entre femmes blanches et femmes de couleurs, ou entre femmes et hommes. Car, oui, un homme posant torse nu en couverture d'un magazine, c'est sexy à souhait, mais une femme, c'est vulgaire. C'est ça, le double-standard.

crédit : Jennifer Polish

crédit photo : Jennifer Polish

Depuis des décennies, les femmes de couleurs veulent être considérées comme des féministes à parts entières. Un des exemples les plus frappants de cette exclusion est le discours que tiendra Patricia Arquette dans les coulisses des Oscars. Ce jour là, l'actrice gagne l'Oscar du meilleur second rôle pour le film Boyhood, et elle y fait un discours engagé sur l'inégalité des salaires hommes/femmes, discours emplit d'émotions et de vérités :

« À toutes les femmes qui ont enfanté, à tous les contribuables et à tous les citoyens de ce pays, nous nous battons pour l'égalité des droits. Il est temps pour nous les femmes, d'obtenir l'égalité salariale et l'égalité des droits aux États-Unis. ».

Cependant, ce qu'elle déclarera ensuite pendant une conférence de presse dans les coulisses de la cérémonie est beaucoup trop problématique :

« Et, il est temps, pour toutes les américaines, et tous les hommes qui aiment les femmes, tous les gays et les personnes de couleurs de se battre pour nous comme nous l'avons fait pour eux. »

pour voir la conférence, c'est ici.

On se doute que ses intentions ne sont pas mauvaises, mais malheureusement, cela montre bien un manque de morale, et elle n'est pas la seule à considérer les femmes de couleurs et les lesbiennes en dehors du mouvement féministe. Être gay, ou noire ne doit pas nous exclure du féminisme, car nous nous battons pour la même chose : l'égalité entre les sexes. Ça sonne naïf, mais la cause avancerait beaucoup plus rapidement si l'intérieur même du mouvement arrivait à travailler et à se battre ensemble, dans la même unité. Le féminisme est un combat commun, et le diviser en plusieurs blocs le rend beaucoup plus fragile.

Le féminisme blanc n'est pas une invention de féministes bobos et ennuyées. C'est malheureusement un vrai problème dans une société qui tend à s'améliorer, mais qui reste campée sur des idées dépassées et des actes d'un autre temps.

crédit photo : Rampages

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